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Émigration clandestine : Khoudia et l’enfer des forêts marocains

À Yarakh, quartier populaire de Dakar battu par les vents de la mer, on parle à voix basse du destin de Khoudia. Partie deux fois à la recherche d’un avenir meilleur, elle a traversé l’enfer et vu la mort de près. Aujourd’hui, revenue vivante mais marquée, Khoudia transforme sa douleur en force. Son nouveau rêve : ouvrir un petit restaurant en bord de mer, pour nourrir ses enfants… et sa dignité.

Khoudia, comme tant d’autres jeunes femmes sénégalaises, est partie pour le Liban à travers un réseau informel. Elle espérait y trouver un travail stable, envoyer de l’argent à sa famille, construire un futur. Mais dès son arrivée, la réalité l’a frappée de plein fouet : violences verbales, racisme quotidien, conditions de travail inhumaines. Fuir est devenu vital pour elle. « C’est par miracle que j’ai pu revenir au Sénégal, blessée, mais vivante », souligne-t-elle.

Le Maroc et l’Espagne : l’exil par la terre, l’enfer dans les forêts

Malgré les cicatrices, Khoudia n’a pas abandonné son rêve d’ailleurs. Cette fois, elle tente la route. Direction le Maroc, dans l’espoir de franchir la frontière vers l’Espagne. Mais ce nouveau chemin est encore plus cruel. Coincée des semaines dans les forêts, « j’ai affronté la faim, le froid, la peur, les violences. J’ai dormi à même le sol, fuit la police, vu des compagnons d’infortune tomber malades, et parfois mourir », affirme khoudia.

Khoudia aurait pu sombrer. Elle aurait pu se taire. Mais elle a choisi de parler, d’agir, de se battre. Son histoire, dure et bouleversante, est celle de tant d’autres femmes invisibles, qui rêvent, tombent, et se relèvent.

Son second retour au Sénégal ressemble à une résurrection. Cette fois, Khoudia décide de ne plus partir. « Mon avenir, je le construis ici », dit-elle.

Forte de son expérience, elle refuse la fatalité. Elle se lance dans la vente de poisson, un métier qu’elle connaît, une activité honnête et locale. Mais son rêve ne s’arrête pas là : elle veut ouvrir un restaurant au bord de la mer à Yarakh. Un lieu simple, vivant, où elle pourra travailler dignement et nourrir ses enfants sans jamais dépendre d’un réseau ou d’une promesse lointaine. Et peut-être qu’un jour, dans son petit restaurant, des jeunes filles viendront l’écouter raconter comment, malgré deux enfers, elle a trouvé le chemin du retour – et de la liberté.

 

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